La croissance tumorale
  La croissance des cancers comporte 2 étapes :
   
  1. croissance tumorale locale : apparition d'un clone tumoral, à partir d'une cellule "transformée", sous l'action d'agents carcinogènes initiateurs et promoteurs (cf biologie de la cellule cancéreuse) la prolifération cellulaire aboutit à la constitution de la tumeur.

  2. dissémination cancéreuse, à partir de la tumeur initiale développement de tumeurs secondaires (métastases) dissémination régionale, puis générale. Elle fait la gravité du cancer, car on sait traiter la tumeur primitive, mais pas les métastases.

  Notion d'hétérogénéité des populations tumorales
   

On considère qu'un cancer dérive d'une seule cellule "transformée" : théorie clonale. En fait, les cancers humains et animaux sont constitués de plusieurs populations cellulaires, ayant des aspects et des propriétés parfois très différents : morphologie, caryotype, caractères antigéniques et immunogénicité, capacité métastatique, sensibilité à la chimiothérapie.
Cette hétérogénéité reflète l'instabilité génétique des cellules cancéreuses : notion de divergence clonale (apparition de sous-populations cellulaires dérivées du clone initial)
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  La vitesse de croissance cancéreuse
 

Les cancers ont une vitesse de croissance très variable (notion de temps de doublement d'une tumeur, apprécié cliniquement ,palpation, radiographie ..) Son évaluation est difficile : la tumeur peut etre tumeurs mal limitée,  le temps de doublement est variable au cours de l'évolution d'un cancer.
La vitesse de croissance dépend du nombre de cellules prolifératives, engagées dans le cycle cellulaire (phases S + G2 +M) par rapport aux cellules quiescentes(en G0), des pertes cellulaires : par nécrose ou apoptose. Il est possible de déterminer l'index de prolifération d'une tumeur .

  Les étapes morphologiques de la croissance tumorale
 

Des anomalies morphologiques associées à différentes étapes de l'apparition et de l'évolution d'un cancer, sont connues dans de nombreux organes, en particuliers au niveau des épithéliums.

  • stades précoces (transformation cell) : dysplasie et cancer débutant (in situ ou intra-épithélial) limites floues entre dysplasie et cancer débutant (morphologiquement)
  • invasion : cancer invasif (envahissement du tissu normal voisin) et critères formels de malignité
  • dissémination : métastases.

Dysplasie et carcinome in situ = stade initial

  • Dysplasie : "anomalie du développement ou de la croissance"
    Utilisé en cancérologie pour désigner des lésions pré-cancéreuses, observées au niveau des épithéliums, caractérisées par :
    * une désorganisation de l'architecture du tissu, de gravité variable
    * des anomalies de la différenciation cellulaire, d'intensité variable
    * une irrégularité de taille des cellules et des noyaux
    * une augmentation du nombre de mitoses.
    Selon la gravité de ces lésions, on distingue selon les épithéliums :
    une dysplasie légère, moyenne ou sévère
    une dysplasie de faible grade ou de haut grade


  • Carcinome in situ ou intra-épithélial :
    Tumeur maligne strictement limitée à l'épithélium dans lequel elle a pris naissance.
    Pas d'invasion du tissu normal: la membrane basale de l'épithélium est respectée.
    La distinction entre dysplasie sévère et carcinome in situ est ainsi difficile, voire impossible.

L'évolution des dysplasies

Elle reste mal connue : elle est probablement très variable :
une dysplasie (et même un cancer in situ) peut rester stable de façon très prolongée (de nombreuses années), des cas de régression spontanée de dysplasie sévère ont été rapportés
Il est cependant admis que les lésions de dysplasie évoluent le plus souvent vers l'aggravation et l'apparition d'un cancer : séquence dysplasie-cancer.La découverte des lésions à ce stade permet d'obtenir la guérison par un traitement local.

Cancer invasif :

l'invasion tumorale est dûe à la prolifération des cellules cancéreuses, à leur mobilité et la sécrétion d'enzymes protéolytiques, entraînant la destruction et l'envahissement des tissus sains.
pour les épithéliums, la 1ère étape est le franchissement de la membrane basale l'extension tumorale locale se fait dans le tissu conjonctif, où les cellules cancéreuses arrivent au contact de vaisseaux sanguins et lymphatiques, de nerfs.2 stades sont distingués :

  1. carcinome micro-invasif : franchit la membrane basale et comporte une invasion débutante du chorion conjonctif Le pronostic est meilleur que celui des carcinomes infiltrants.
  2. Cancer invasif

L'examen anatomique permet de faire le constat de l'extension tumorale, essentielle pour l'estimation du pronostic L'examen macroscopique des pièces opératoires a ici une importance capitale.

 
  • taille de la tumeur.
  • degré d'infiltration.
  • envahissement lymphatique, veineux, nerveux.
  • métastases ganglionnaires à proximité et à distance de la tumeur.
  • envahissement des organes de voisinage.
  • métastases séreuses et viscérales.
  • étude des limites de résection.

Valeur de la morphologie dans l'évaluation pronostique d'une tumeur : la morphologie ne permet qu'une estimation du risque évolutif d'une tumeur donnée (bénigne ou maligne), sans pouvoir prédire avec certitude son évolution. Elle ne tient pas compte des stades moléculaires de la carcinogenèse actuellement connus.

La dissémination cancéreuse : stade des métastases
 

Développement à distance de la tumeur initiale, d'autres foyers cancéreux (tumeurs secondaires). fait toute la gravité du cancer : après l'exerèse de la tumeur, la persistance et la survie de cellules cancéreuses permettent le développement des métastases.

Mécanismes cellulaires des métastases : les cellules cancéreuses doivent franchir plusieurs étapes :

  • effraction de vaisseaux sanguins et lymphatiques
  • survie et circulation dans le sang ou la lymphe
  • implantation et croissance dans un tissu.
  • elles doivent avoir acquis des propriétés particulières :
    perte de l'ancrage cellulaire, par modifications de molécules d'adhésion
    acquisition de la mobilité cellulaire (expression de facteurs de mobilité souvent autocrines, action de facteurs chimiotactiques)
    protéolyse: destruction des membranes basales et de structures intercellulaires (production par les cellules tumorales de collagénases)
    capacité d'adhérence à l'endothélium capillaire, par des récepteurs spécifiques (intégrines)
    capacité de croissance dans le site d'implantation, avec induction d'un stroma et néoangiogenèse (rôle de facteurs de croissance et de facteurs angiogéniques locaux, systémiques ou autocrines).

Chaque étape du processus métastatique ne peut être franchie que par un petit nombre de cellules tumorales ; qui ont acquis les propriétés nécessaires. Ces cellules doivent aussi être capables de resister à la défense immunitaire anti-tumorale : cellules NK, lymphocytes T cytotoxiques.
L'acquisition de la capacité métastatique nécessite, après la transformation cellulaire, des anomalies génétiques supplémentaires. Ces anomalies sont acquises par certaines cellules tumorales de façon transitoire, en raison de leur instabilité génétique.

La transformation cellulaire et la capacité métastatique comportent des mécanismes communs et d'autres différents.
perte du contrôle de la prolifération cellulaire (en commun)
propriétés anormales de mobilité et de protéolyse (métastases).
Il n'a pas été identifié jusqu'ici de gènes responsables de l'acquisition du phénotype métastatique.

Le développement de thérapeutiques permettant d'interférer avec chacun des phénomènes du processus métastatique peut être envisagé : agents anti-angiogéniques, inhibiteurs protéolytiques.

Aspects généraux de la dissémination métastatique.
Les voies de cheminement : 2 voies principales, lymphatique et sanguine

Dissémination lymphatique :

la présence de cellules cancéreuses est pratiquement constante dans les vaisseaux lymphatiques poches de la tumeur.Leur devenir est variable :

  • mort cellulaire dans le vaisseau lymphatique pénétration dans les ganglions satellites de la tumeur
  • destruction des cellules tumorales dans ces ganglions
  • persistance prolongée de cellules tumorales quiescentes dans ces ganglions, avec possibilité de prolifération ultérieure
  • développement précoce d'une métastase ganglionnaire
  • drainage de cellules tumorales vers d'autres ganglions plus éloignés puis vers le canal thoracique et la circulation artérielle sanguine.

Parfois les premiers relais ganglionnaires sont sautés, avec envahissement de ganglions plus éloignés. L'importance et le siège des métastases ganglionnaires sont des facteurs pronostiques importants d'un cancer. Certains cancers ont une dissémination lymphatique fréquente : cancers du sein, testicule, thyroide, col utérin, langue, mélanome malin.
La lymphangite carcinomateuse correspond à un envahissement métastatique massif des lymphatiques, visible en particulier dans le poumon, la plèvre.

Dissémination sanguine (ou hématogène) : se voit dans les carcinomes (bronches) et les tumeurs conjonctives malignes (sarcomes). elle fait suite à la pénétration des cellules cancéreuses dans les vaisseaux sanguins; avec dissémination dans les viscères par voie veineuse :

  • métastases hépatiques provenant de la veine porte
  • métastases pulmonaires provenant de la veine cave
  • dissémination dans la grande circulation provenant des veines pulmonaires.

Beaucoup de cellules sont détruites. Certaines cellules seulement seront à l'origine d'une métastase, dans certains organes , "une graine ne peut pousser que sur un terrain qui lui est favorable". Il existe
des organes fréquemment colonisés par des métastases: foie, poumon, os, surrénales, des organes rarement atteints par des métastases: rate, rein, muscle

Les métastases sont découvertes à des moments très variables de la maladie cancéreuse :

  • métastases révélatrices, la tumeur primitive n'étant pas connue
  • métastases comtemporaines de la tumeur primitive (découvertes lors du bilan d'extension)
  • métastases survenant de façon précoce ou tardive au cours de l'évolution du cancer.
    Quand la métastase est révélatrice, l'histologie permet d'orienter la recherche de la tumeur primitive.

Si la morphologie est peu caractéristique (tumeur indifférenciée), l'immunohistochimie permet de rechercher des marqueurs épithéliaux, conjonctifs, leucocytaires, des marqueurs tumoraux ...

 

 

 

 

 

 

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